YouTube lance une offre de télévision payante aux États-Unis

Après YouTube Red et YouTube Music, le service de vidéos lance une offre de live streaming sur mobile et un bouquet payant de télévision sur internet, qui le positionne de facto face à Facebook d’un côté, et aux câblo-opérateurs américains de l’autre.

Conçu en 2005 pour échanger des vidéos sur internet auprès d’une communauté, le tout gratuitement, YouTube se professionnalise à grand pas tandis que la vidéo en ligne se banalise, qu’il s’agisse des services de SVOD comme celui de Netflix ou d’Amazon, ou qu’il s’agisse des services de live streaming proposés par Periscope (Twitter), Facebook, Instagram ou Snapchat. En réponse à ces nouveaux concurrents, YouTube cherche à l’évidence à s’imposer comme la plate-forme qui fédère en son sein l’offre la plus étendue de vidéos, en intégrant tout à la fois les vidéos des créateurs en ligne les plus en vue, mais aussi les clips vidéo et désormais les images produites par les chaînes de télévision. Cette professionnalisation de l’offre s’accompagne d’une évolution du modèle d’affaires. Gratuit depuis l’origine, financé par la publicité dont les revenus sont partagés entre YouTube et les créateurs de vidéos, le service au milliard d’utilisateurs depuis 2013 s’achemine de plus en plus vers une offre mixte, à la fois gratuite et payante. Certes, le gratuit reste dominant et il favorise la prolifération de l’offre de contenus.

Ce sont ainsi 65 années de vidéos qui ont été mises en ligne chaque jour sur YouTube en 2016. Le phénomène de prolifération devrait encore s’accélérer avec la possibilité de proposer des live streams sur YouTube, à savoir de la vidéo en direct. Ce format s’est développé avec l’essor des smartphones et du haut débit mobile, qui permet de diffuser en direct des vidéos brutes, lesquelles ont fait le succès de services comme Snapchat ou Periscope, et qui assurent aujourd’hui le développement de l’offre vidéo de Facebook. Afin de profiter de ce nouvel engouement et de renforcer sa présence sur mobile, où la concurrence sur la vidéo en ligne s’est développée, YouTube a annoncé début février 2017 l’ouverture de son service de live streaming à tous les youtubeurs disposant de plus de 10 000 abonnés, avant d’étendre cet outil à l’ensemble des utilisateurs.

Le live retient également l’attention de YouTube, mais cette fois dans l’univers payant. En effet, à côté de l’offre gratuite de vidéos en ligne, YouTube développe des offres payantes afin de proposer des expériences nouvelles et optimisées pour la consultation d’images en ligne. Deux offres payantes ont ainsi été lancées en 2015. En octobre, le service YouTube Red était proposé aux États-Unis et donnait accès, moyennant 9,99 dollars par mois, à l’ensemble de YouTube sans publicité et à une série de contenus exclusifs. En 2016, YouTube Red a été ouvert au Mexique, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Corée du Sud. En 2017, YouTube a annoncé sa volonté de renforcer sa politique de production de programmes exclusifs pour YouTube Red avec le financement de TV shows pour des budgets compris entre 3 et 6 millions de dollars l’heure, l’équivalent donc des TV shows des grands réseaux américains de télévision. En novembre 2015, deux mois après le lancement de YouTube Red, une deuxième offre payante était proposée, YouTube Music, qui permet d’écouter YouTube en mode audio, sans l’image, et de retrouver ensuite les clips vidéo en ligne. YouTube Music a été intégré d’emblée dans YouTube Red sans surcoût (voir La rem n°37, p.60).

L’offre payante sur YouTube a depuis franchi un nouveau palier, beaucoup plus significatif, avec à la fois la consécration du live et une passerelle vers la télévision. Le 28 février 2017, YouTube a annoncé le lancement aux États-Unis d’un abonnement à une offre en ligne incluant des chaînes de télévision en direct pour 35 dollars par mois. L’offre intègre les chaînes des grands réseaux (ABC, CBS, FOX, NBC) et certaines des chaînes qui font le succès des offres particulièrement onéreuses des câblo-opérateurs américains comme la chaîne sportive ESPN. D’autres chaînes prestigieuses sont en revanche absentes, notamment HBO. De ce point de vue, l’offre de chaînes de télévision sur YouTube s’apparente à un « bouquet amaigri » ou « skinny bundle », puisqu’elle est facturée au même prix que DirecTV Now aux États-Unis (voir La rem n°41, p.40).

L’approche cependant est différente, parce que l’offre YouTube est bien plus large qu’un simple bouquet de chaînes. Elle inclut en effet l’ensemble des vidéos de la plate-forme, notamment les vidéos exclusives développées pour YouTube Red, même si elle ne donne pas accès pour ce prix au service YouTube Music. YouTube profite donc de sa présence en ligne pour créer une offre de télévision payante qui surpasse largement celle de ses concurrents issus de l’audiovisuel qui ne peuvent pas en proposer autant. Il y a en revanche une contrepartie. Si l’offre de télévision payante de YouTube est accessible sur tous les écrans, elle ne l’est que lorsqu’on est connecté, et elle n’est pas accessible directement depuis un téléviseur, sauf à raccorder celui-ci à un PC grâce à une clé Chromecast. Cet inconvénient est présenté comme un avantage : les programmes proposés en direct sont consultables pendant neuf mois quand on les sauvegarde dans le cloud, permettant la constitution d’un catalogue personnel et une consommation à la demande et en différé de la télévision.

Sources :

  • « YouTube se lance dans la vidéo en direct sur mobile », Lucie Ronfaut, Le Figaro, 9 février 2017.
  • « YouTube franchit la barre du milliard d’heures de vidéos visionnées par jour », Nicolas Richaud, Les Echos, 1er mars 2017.
  • « YouTube s’attaque au câble avec un service de télévision en ligne », Anaïs Moutot, Les Echos, 2 mars 2017.
  • « Vidéo : l’insolente ambition de YouTube et de Snapchat », Nicolas Madelaine, Les Echos, 9 mai 2017.

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